the heist. (leo)

Iggy finit par rentrer la clé dans la serrure – qui s'était mise en tête de ne pas se laisser faire, cette pétasse, quand ses épaules se mirent à sursauter frénétiquement. Une seconde plus tard, elle laissa échapper le son qui lui rongeait l'intérieur de la bouche. Un grand éclat de rire qui résonna dans le sas et que Leo ne tarda pas à imiter. Dès que sa voix à lui, plus grave, se fit entendre dans huis-clos, elle se retourna en émettant un "chuuuut" sonore à l'intention de son frère. Elle avait une réputation à maintenir dans cet immeuble, et rentrer au lever du soleil, titubante, avec son petit frère, n'était pas ce dont elle se targuait le plus. Iggy ne se souvenait même plus de la raison de leur fou rire. Leo avait dit quelque chose de relativement amusant sur le trajet du retour qui l'avait fait hurler de rire et depuis, ils avaient été tous les deux infectés. Elle finit par tourner la clé en poussant sur le battant de la porte, et celle-ci céda. Who's laughing now, bitch? "Allez, ouste, par là mon cher !" scanda Iggy avec un mouvement de bras théâtral, qui tomba à l'eau car l'attention de Leo était occupée ailleurs. Il scannait, trop proche pour que ça puisse être sain pour sa rétine, les noms sur les boutons de l'interphone. Iggy poussa un soupir qui posait à lui seul la question qu'elle avait la flemme de formuler et, en guise de réponse, il posa le doigt sur une des étiquettes blanches. "Hé, j'connais ton voisin". La brune se décolla de l'embrasure de la porte contre laquelle elle s'était adossée, et se pencha pour regarder le nom qu'il indiquait. "Mais idiot, c'est moi là-" commença-t-elle avant de se rendre compte que le doigt de son frère n'était pas sur l'étiquette 5A, mais 5B. Le mec d'en face. Elle leva un sourcil explicite. "Hmm, alors comme ça, tu connais 5B ? Et tu le connais, ou tu le connais-connais ?" C'était son frangin. Son pote. Sa créature. Il pouvait choisir de lâcher le morceau ou vivre avec la certitude qu'il ne lui faudrait même pas 24h pour le découvrir.    

t'y vois plus très clair, t'as un peu forcé sur la bouteille. mais tu t'en moquais bien, parce que c'était les parents qui trinquaient pour les boissons que vous commandiez. alors forcément, maintenant, t'as plus trop l'esprit à faire du calcul mental et à te concentrer sur une équation. t'es plus du genre à rire comme un crétin pour avoir balancé une phrase sans importance. phrase sans importance qui t'a pourtant entraîné très loin, t'as mal aux reins à force de te tenir les côtes, plié en deux de rire. le trajet t'avait presque paru interminable entre le bar et l'immeuble de ta soeur. d'ailleurs, elle riait aussi. et chaque fois qu'elle recommençait, toi, tu suivais derrière. alors forcément, c'était un peu difficile pour toi d'avoir les idées claires. à chaque fois qu'elle se tournait vers toi pour te demander de la fermer, tu la rembarrais d'un généreux majeur pointé vers le ciel tout en lui tirant la langue. quand t'as bu, t'as douze ans, même moins. t'en serais presque retombé à l'époque où tu lui tirais la queue de cheval en criant huuu cocotte jusqu'à ce qu'elle s'énerve suffisamment pour cogner ta tronche d'ange. devant l'immeuble, tu te mets à inspecter les noms sur les boutons de l'interphone. en vrai, tu t'en fiches, mais là, dans ton état, tu trouves ça comique de voir le nombre de portugais qui se sont installés dans l'immeuble de ta soeur, et puis, tu tombes sur Teddy ! ouais, lui tu connais alors tu butes, et tu restes dans cette position. alors ta soeur, elle te rejoint, et, tout fier, tu pointes du doigt le nom de ton pote en déclarant. Hé, j'connais ton voisin. d'abord, elle doute de tes propos et puis, après s'être penchée, elle en revient à te poser la question qu'elle te pose à chaque fois que tu lui parles d'un mec. tu éclates de rire en tapant son épaule avec tendresse. on n'en est pas encore là. et tu rigoles. personne résiste au charme Goldwyn, tu sais très bien. et tu éclates de rire à nouveau. après cet épisode que tu qualifieras d'inutile demain au réveil, tu emboîtes le pas à ta soeur pour entrer dans l'immeuble. mais à présent, c'est elle qui bute sur le palier. hé, duchesse. tu viens ? et t'attends qu'elle se décide. mais t'as les jambes qui vacillent et l'esprit qui s'embrume de plus en plus. une heure de plus à l'extérieur et tu ne réponds plus de rien. vaut mieux rejoindre la chambre d'ami de ta soeur et pioncer... sauf que, ça va pas vraiment se passer comme ça.

L'arrogance Goldwyn, surtout. Avant le charme. Il mériterait une pichenette sur le crâne si Iggy ne savait pas pertinemment que c'était elle qui lui avait appris les avantages de la confiance en soi impénitente. De toute façon, elle avait mis les sévices physiques envers son frangin en sourdine depuis qu'il avait atteint la majorité. Elle se retint d'enfoncer le clou avec un "pas encore, hm ?" tout sauf subtil – puis une remarque de sa part sur les fréquentations de Leo aurait été l'hôpital qui se fout de la charité. Sa rupture avec Roman l'avait laissée dans un sale état, suffisamment pour qu'elle suive trop facilement ses coups de tête d'après deux cocktails. Cela dit, ça ne devait pas l'empêcher de garder un œil bienveillant et curieux sur son frère – ses intrusions constantes dans sa vie privée, c'était pour son bien, il était temps qu'il se l'enfonce dans le crâne. De son côté, elle, elle n'avait rien à lui cacher. Un Vogue ouvert, elle était. Et l'idée germa, tellement évidente. Iggy leva un sourcil espiègle en direction de son frère, peut-être trop intoxiqué pour pouvoir l'identifier. "Changement de programme, hombre." Iggy se dirigea vers son frère et passa un bras autour de ses épaules, l'emmenant avec elle dans le hall qui menait aux ascenseurs. Mais au lieu d'envoyer ses escarpins sur la droite, dans ses propres pénates, elle les emmena sur la gauche. Le monde inconnu des appartements B. "Tu crois pas qu'on doit en savoir un peu plus sur 5B avant de te laisser t'approcher de lui ?" Elle se mit à hocher la tête énergiquement en réponse à sa propre question. Effet shaker qui alla mélanger à nouveau les mojitos sous son crâne. Suivit une tentative de reprendre son équilibre contre Leo, qui était présentement en train de récolter des résultats médiocres à l'épreuve tenir sur ses jambes. "Je sais où il planque sa clé de secours" murmura-t-elle, comme si, tout à coup, les propos échangés étaient devenus criminels.  

tu la regardes depuis l'intérieur du bâtiment, presque impatient qu'elle rentre à son tour et que tu puisses rejoindre le pays de Morphée. t'as les jambes qui tremblent et tu commences même à transpirer. t'es pas certain que tu te souviendras de toute votre soirée demain mais, présentement, c'est pas le soucis. parce qu'Iggy, tu la connais par coeur, et quand elle tique comme ça, tu t'attends à tout sauf qu'elle soit raisonnable. alors forcément, quand elle t'annonce un changement de programme, tu rigoles à moitié. elle t'attrape par les épaules et, à deux, vous tentez tant bien que mal de rejoindre l'étage de son appartement. le hic, c'est qu'au sommet des escaliers, vous tournez pas dans la bonne direction. hé l'alcoolique, c'est pas là ton appartement. tu tentes de retourner la situation mais rien à faire. de toute façon, ta soeur a toujours été plus forte que toi à ce genre de jeu. quand elle a une idée en tête, t'peux rien faire pour l'en dissuader. et puis, t'aurais trop peur qu'elle sorte un concombre de son sac et qu'elle t'assomme avec. alors en gentil petit frère, tu cèdes à l'appel insensé de ta soeur pour l'aventure et tu la suis jusqu'à te retrouver face à l'appartement de Teddy. tu reconnais la porte, t'y as frappé pas plus tard qu'hier. tu l'écoutes te faire une proposition qu'en temps normal tu jugerais indécente mais, en l'état, tu trouves ça trop drôle. t'éclates d'un rire tonitruent qui raisonne dans la cage d'escalier. et moi j'connais son appartement. enfin, son salon, j'ai pas encore eu l'privilège d'entrer dans sa chambre. tu la bouscules en riant alors qu'elle s'efforçait de rester discrète. pris au jeu des espions, tu te reprends, quittes ta soeur et retournes près des escaliers, plies légèrement les jambes et lance des coups d'oeil à gauche à droite. faucon à mouette, faucon à mouette. RAS dans la cage d'escalier, tu peux lancer l'opération "intrusion dans la vie privée du 5B". et tu te remets à rire. demain, tu te souviendras de tout ça avec une once de culpabilité, ce soir, t'en as rien à foutre des limites du convenable et du reste. tu ne penses qu'à t'amuser...